J'aime raconter l'histoire d'un narcissique pour démontrer un point important à propos du poker. Un homme va à une soirée. Il est vraiment imbu de lui-même. Il commence à parler à une femme. Il ne parle que de lui, de sa fortune, de sa superbe voiture, de sa magnifique maison, de sa maison au bord de la mer, de son récent voyage à Maui et de sa collection de vin, etc. Elle acquiesce et il pense qu'elle est captivée par son discours. Mais au bout du compte, il commence à manquer de ressources. Il en fait tellement que ce torrent de paroles en dit long sur lui. Il arête et, dans un geste qu'il croie être attentionné et magnanime, il renvoie la conversation vers elle en disant :
« Mais assez parlé de moi. Parlons de vous. Qu'est ce que vous pensez de moi ? »
Aussi narcissique et égocentrique que cela puisse paraître, c'est cette façon que nous devrions approcher les autres joueurs à une table de poker. Nous devrions sans cesse nous demander ce que les autres joueurs pensent de nous.
Loin d'être égocentrique, c'est une nécessité stratégique que de considérer comment les autres joueurs nous percoivent. Cela détermine leur jeu contre nous et, en tant que tel, devrait contribuer à nos actions.
Voici un exemple simple.
Disons que vous êtes vu comme le joueur le plus serré de la planète. Aux yeux de tous vos adversaires vous ne misez absolument jamais sauf si vous avez la meilleure main possible. Vous ne bluffez jamais à leurs yeux.
Maintenant, imaginez. La « third street » en Stud7. Vous avez été assez chanceux pour avoir (A♠ 6♦) A♥. Vous relancez le « bring in ». Alors le joueur à votre gauche, avec (xx) 8 vous relance. Il n'est pas un joueur rusé, ni un joueur agressif. Tout le monde se couche. Que faites-vous ?
Ne répondez pas. Considérez plutôt ce second exemple.
Vous avez exactement la même main. Mais dans cette partie, votre image est celle d'un joueur maniaque. Le joueur à votre gauche, ni rusé ni agressif, a exactement la même main et vous relance. Que faites-vous ?
Dans le premier cas, bien que cela puisse paraître incroyable de le considérer, je pourrais bien jeter mes cartes suspectant un brelan. Pourquoi sinon m'aurait-il relancé quand il était sûr que, avec mon image de joueur super serré, j'avais certainement des As ? Dans le second exemple, je sur-relancerais tout de suite ou, plus probablement, je suivrais en espérant le piéger par un « check-raise » sur la « fourth street ». Etant donné qu'il m'a mis sur un style maniaque, il pourrait bien me relancer juste pour écarter l'hypothèse vraisemblable d'un bluff.
Ma différence dans l'action est entièrement basée sur l'image qu'ils ont de moi. L' « image » est un sujet très complexe, particulièrement quand vous essayez de trouver quelle est votre image dans l'esprit d'autres joueurs. Il existe de nombreuses raisons pour lesquelles arriver à trouver votre image dans l'esprit de vos adversaires est difficile. La première est l'illusion de soi.
Votre image dans votre propre esprit peut tout à fait être différente de ce que vous êtes réellement. Nous avons tendance à embellir notre propre image et supposer que les autres partagent cette vision à notre porpos. C'est un des mauvais côtés d'être un joueur réfléchi. Je m'explique.
Nous sommes réfléchis, tout au moins ceux qui lisent et prennent en considération la théorie du poker. Nous avons une vue de ce qu'est le vrai jeu de poker et nous nous attribuons les attributs que nous admirons. Ne faites-vous pas cela ? Vous savez que vous êtes supposés jouer d'une certaine façon et donc vous avez tendance à faire apparaître que vous jouez vraiment de cette façon.
Par exemple, disons que vous appréciez l'importance d'un jeu serré agressif en « limit stud ». Pour la plupart, vous connaissez l'importance d'attendre avant d'avoir des cartes premiums. Ensuite vous misez et relancez quand vous en tirez le meilleur. Ceci pourrait définir votre compréhension de base sur la façon jouer au mieux.
Mais ça peut ne pas être la façon dont vous jouez à la table. Certains joueurs, par exemple, manquent d'autodiscipline pour jouer de la manière dont il devraient jouer. Même dans ce cas, ils ne sont pas assez conscients pour reconnaître ce défaut ou même s'ils le reconnaissent, ils le minimisent.
Je connais un joueur qui a lu tout ce qui concernait le Stud. Il pense être un joueur solide, mais il ne l'est pas. Il est bien trop lâche la plupart du temps. Mais il croit être un joueur serré et agressif. Il se leurre en pensant que son image d'un joueur idéal est l'image qu'il donne de lui.
Nos adversaires ne savent pas et ne se soucient pas de comment nous pensons être. Les observateurs notent seulement comment nous nous comportons. Donc si nous sommes dans l'illusion, leur image de nous sera différente de l'image que nous avons de nous-mêmes.